Édito
Lorsque, avant sa venue à l’être, Dieu envoie une âme dans le monde, celle-ci trépigne, résiste, supplie, bref, fait tout pour éviter de devenir chair. Puis elle finit pas céder – on peut penser : mi par lassitude, mi par inconscience, à défaut d’avoir pu mesurer les conséquences d’une telle acceptation. « Tu m’as séduit, Seigneur, et je me suis laissé séduire », dit Jérémie (ch. 20, v 7) avant de maudire sa propre naissance (v. 14), à l’instar de Job (ch. 3). Si l’on en croit la tradition juive nous enseignant cette réticence de l’âme à venir en ce monde, nous avons tous dit « non ».
Tous, vraiment ? Il y en a toutefois bien un qui a dit « oui » en toute connaissance de cause : celui qui nous a rejoints dans notre humanité, est devenu chair (Jean 1, 14). Celui qui est la Parole de lumière, le « oui » en qui tout a été fait est « venu chez les siens » (Jn 1, 11a). C’est ce que nous rappelle le temps de Noël que nous préparons. C’est ici que tout est renversé, ici que tout devient possible.
Nous voici donc tous avec notre « non » appelés à un acte de confiance à la suite de celui-là seul qui a dit « oui » pour nous en connaissance de cause.
Pour nous aussi, quoiqu’il en ressorte, il est alors temps, au-delà de nos refus – car nous ne l’avons d’abord pas reçue (Jn 1, 11b) –, il est temps, par-delà nos refus, de recevoir le don qui nous est fait : à quiconque a reçu la Parole de lumière, « elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu » (Jn 1, 12).
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Tandis que les ténèbres couvrent la terre, tandis que le brouillard de nos douleurs nous empêche encore de voir clairement ce mystère, le peuple de Dieu, est déjà rayonnant de la lumière de Dieu, sa Gloire.
« Mets-toi debout et deviens lumière, car elle arrive, ta lumière : la gloire du Seigneur sur toi s'est levée. Voici qu'en effet les ténèbres couvrent la terre et un brouillard, les cités, mais sur toi le Seigneur va se lever et sa gloire, sur toi, est en vue. Les nations vont marcher vers ta lumière et les rois vers la clarté de ton lever » (Ésaïe 60, 1-3).
C’est cette promesse que Noël renouvelle. L’Alliance est renouvelée et étendue à toutes les nations, pour que l'Église soit riche de toutes leurs cultures, de toutes leurs couleurs, de toutes leurs légendes et traditions, de tous leurs chants.
La promesse d'Ésaïe est en marche. Ceux qui déjà se sont approchés de la Jérusalem nouvelle, ville de la paix, portent les louanges du Seigneur de loin en loin, se font ses messagers, pour autant d'échos d'extrémités du monde en extrémités du monde.
La promesse se déploie par l'octroi du pardon : par la foi seule, on a accès à la Jérusalem céleste ! Cela vaut pour tous, quelle que soit sa tradition, sa provenance, ses rites. Sur ce fondement de la mission universelle, le pardon, et le pardon réciproque de tout ce qu'est chacun, le pardon des fautes aussi, ce don de Dieu pour l'acceptation de tous et pour un nouveau départ, se bâtit l'Église universelle.
Le don de Dieu, le dévoilement de ce grand mystère se poursuit, et nous sommes encore invités à en être.
Aujourd'hui à nouveau, Dieu nous accueille comme ses enfants, tous, d'où que nous soyons, par pure grâce, par don, cadeau de Noël pour nous porter à travers les jours qui s’ouvrent, pour que nos lendemains soient lumière.
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